Le Burkina Faso a organisé des élections couplées présidentielle et législatives le 29 novembre 2015, afin de marquer la fin de la Transition et envisager le retour à une vie constitutionnelle normale. Dans le cadre de son projet «Consolidation de la démocratie et de la cohésion sociale au Burkina Faso (post insurection) pendant la période 2015-2017» et en s’appuyant sur le message des évêques du 06 septembre 2015, l’Eglise catholique au Burkina a, à travers les commissions épiscopales : OCADES Caritas Burkina, Justice et Paix, Education, Moyens de Communication Sociale, Tribunaux Ecclésiastiques, déployé une mission d’observation électorale constituée d’observateurs et de superviseurs dans les 15 diocèses du pays.
L’objectif de cette mission était de contribuer à la transparence et à la crédibilité du scrutin. Conformément à sa doctrine sociale, il est du rôle de l’Eglise de veiller à une bonne gestion de la cité en œuvrant pour la justice sociale, la liberté, le respect de la dignité humaine, la sauvegarde du bien commun. L’Eglise n’a pas de parti pris en matière électorale. Elle apporte simplement la lumière de l’Evangile pour éclairer les conduites et contribuer à l’avènement d’un monde meilleur. C’est dans cet esprit que le travail de la mission d’observation électorale s’est déroulé. La remontée des informations nous a permis de suivre de bout en bout le processus afin de formuler des recommandations aux acteurs pour améliorer les échéances électorales futures. Les données recueillies dans les diocèses par nos observateurs et superviseurs ont par la suite été acheminées au Secrétariat Général de l’OCADES Caritas Burkina où elles ont été traitées par une équipe technique d’opérateurs de saisie et d’analystes programmeurs.
De façon générale, malgré les difficultés d’ordre organisationnel, les élections se sont déroulées dans un climat apaisé. L’Eglise adresse ses chaleureuses félicitations à tous les acteurs qui ont œuvré pour qu’il en soit ainsi. La présente déclaration est axée autour des points suivants :
- Déploiement des observateurs et méthodologie de l’observation
- Constats majeurs de la mission d’observation électorale
- Recommandations
I-DU DEPLOIEMENT DES OBSERVATEURS ET DE LA METHODOLOGIE DE L’OBSERVATION
- 500 observateurs et 150 superviseurs à travers les 15 diocèses du Burkina Faso ont été formés avec l’accompagnement du Centre pour la Gouvernance Démocratique, de l’ONG Diakonia et accrédités par la CENI ;
- 385 observateurs fixes ont été déployés dans 385 bureaux de vote identifiés selon le nombre d’électeurs affectés mais aussi la tendance de l’électorat et l’encrage politique des candidats dans les localités abritant ces bureaux de vote ;
- 115 observateurs mobiles avaient pour mission de couvrir chacun 05 bureaux de vote ;
- Tous ces observateurs étaient accompagnés et encadrés par 150 superviseurs qui se sont assurés de l’effectivité du plan de déploiement et de la qualité de la mission d’observation;
- 15 comités de pilotage diocésains de 05 membres chacun ont assuré la coordination des activités d’observation dans leur ressort territorial ;
- Au total, 978 bureaux de vote ont été couverts sur l’ensemble du territoire national
II-DES CONSTATS MAJEURS DE LA MISSION D’OBSERVATION ELECTORALE
De l’ouverture et de la fermeture des bureaux de vote
La mission d’observation a constaté que 95% des bureaux de vote observés ont respecté les procédures et heures d’ouverture à 6H00 et 97% ont respecté l’heure de fermeture à 18H00.
La mission d’observation félicite la présence effective des forces de défense et de sécurité à l’ouverture du scrutin dans 90% des bureaux de vote observés.
De l’aménagement des bureaux de vote
Nos équipes ont constaté que 90% des bureaux de vote visités disposaient du matériel électoral à l’ouverture du scrutin.
Du déroulement des opérations de vote
Les opérations de vote ont été globalement satisfaisantes dans l’ensemble des bureaux de vote visités. Nous avons noté une forte mobilisation des jeunes et surtout la manifestation de leur volonté d’exercer leur droit de vote. Ces attitudes citoyennes participent à la responsabilisation des populations, gage de la vitalité démocratique au Burkina Faso.
Le comportement des électeurs a permis de prendre en compte les besoins des groupes spécifiques tels que les personnes en situation de handicap, les personnes du troisième âge entre autres et de réduire leur temps d’attente. La mission d’observation se réjouit du respect de la dignité de la personne humaine, principe cardinal de la doctrine sociale de l’Eglise catholique.
Du dépouillement
Les opérations de dépouillement se sont déroulées sans incident majeur. La mission d’observation note avec satisfaction que les valeurs de transparence, de tolérance, de consensus ont été partagées pendant la phase de dépouillement. Il faut également signaler la forte mobilisation des électeurs dans l’ensemble des bureaux de vote visités.
Des incidents
En dépit de quelques dysfonctionnements et insuffisances constatés par d’autres missions d’observation, la mission d’observation de l’Eglise catholique n’a relevé aucun incident critique: violence, arrêt de vote, bourrage d’urnes, manque de bulletins, vote suspendu ou interrompu, fermeture de bureaux de vote avant 18H, intimidation d’électeurs, attroupements, distribution d’argent ou de cadeaux.
De l’appréciation globale du scrutin
De façon globale, la mission d’observation se satisfait du bon déroulement du processus électoral en général et du scrutin en particulier ; somme toute positivement apprécié par l’ensemble des acteurs, nonobstant quelques insuffisances qui n’ont pas entaché sa sincérité. L’acceptation des résultats par tous les acteurs en témoigne. La mission d’observation fait mention spéciale de l’acceptation des résultats par les différents candidats aux élections présidentielles et législatives. Elle formule le vœu que cette culture démocratique se perpétue pour les générations futures.
Elle note la mobilisation et la participation de la jeunesse et des femmes.
La mission d’observation apprécie également le travail formidable accompli par la CENI qui d’année en année gagne en maturité et en professionnalisme dans l’organisation des élections. Dans le même sens, elle félicite l’ensemble des acteurs de la société civile, les observateurs nationaux et internationaux, qui ont travaillé en synergie pour accorder du crédit à ces élections.
Dans une dynamique constructive et en vue d’optimiser les échéances électorales futures, la mission d’observation formule les recommandations suivantes.
III-DES RECOMMANDATIONS
A la CENI
- Améliorer le monitoring du déploiement du matériel électoral ;
- Envisager l’affichage de spécimens des bulletins de vote à l’entrée des bureaux de vote pour faciliter l’identification à l’avance par l’électeur du candidat ou symbole du parti de son choix ;
- Communiquer à l’opinion les forces, les faiblesses, les menaces et les opportunités de toutes les initiatives et actions entreprises depuis la révision du fichier électoral à la proclamation provisoire des résultats ;
Aux partis politiques et aux candidats
- Renforcer l’information et la formation des électeurs sur le processus de vote ;
- Déployer des délégués dans l’essentiel au moins des bureaux de vote où l’on est en compétition.
Aux Organisations de la Société Civile et aux médias
- Poursuivre l’effort de sensibilisation et de mobilisation des citoyens et autres parties prenantes des élections autour d’un pacte de bonne conduite des OSC dans le processus électoral ;
- Renforcer la sensibilisation pour des élections sans violences, et une expression libre de chacun.
A l’ensemble du peuple du Burkina Faso
Il n’y a de démocratie véritable que si la participation des citoyens aux choix politiques est assurée ; cela n’étant possible que lorsque « les gouvernés ont la possibilité de choisir et de contrôler leurs gouvernants ou de les remplacer de manière pacifique lorsque cela s’avère opportun » (Centisimus annus, N° 46). La démocratie est la barrière qui nous gardera des crises socio politiques et de leurs conséquences si chaque citoyen prend à cœur de s’inscrire sur le fichier électoral, d’exprimer consciencieusement son choix et l’assumer.
CONCLUSION : LECONS APPRISES ET REMERCIEMENTS
L’observation électorale du scrutin du 29 novembre 2015 a été riche d’enseignement pour l’Eglise catholique au Burkina. Les principales leçons à tirer sont les suivantes :
L’observation électorale est un processus qui nécessite des compétences pluridisciplinaires.
La synergie entre les commissions épiscopales de pastorale sociale, la CENI, le Centre pour la Gouvernance Démocratique, l’ONG Diakonia, CRS Burkina, les membres de la Confédération Caritas Internationalis et Misereor, a permis à la mission d’observation électorale de l’Eglise catholique de contribuer à des élections paisibles, crédibles et acceptées par tous. C’est une dynamique à maintenir et à renforcer.
La célérité et la transparence dans la proclamation des résultats permettent de préserver la paix sociale.
A ce propos, la mission d’observation de l’Eglise catholique félicite la CENI pour la proclamation rapide des résultats et pour son professionnalisme qui permettent au processus électoral burkinabè d’être cité en exemple.
Les citoyens attachent une grande importance aux élections.
Le taux de participation de 60% est appréciable. Cependant, il est nécessaire de poursuivre les efforts pour permettre à tous les citoyens en âge de voter de s’inscrire sur les listes électorales et à tous ceux qui sont inscrits de pouvoir exercer leur droit de vote.
Pour finir,
La Mission d’Observation Electorale de l’Eglise Catholique (MOEEC) adresse ses vives félicitations au peuple burkinabè pour son sens élevé de responsabilité dans la préservation de la paix et de la cohésion sociale tout au long du processus électoral. Elle exhorte les citoyens à œuvrer pour la préservation de la paix, l’unité et la cohésion nationale conformément à l’esprit du message des évêques du 06 septembre 2015 portant sur les élections couplées.
La Mission d’Observation Electorale de l’Eglise Catholique (MOEEC) félicite les autorités religieuses et coutumières, les médias, les organisations de la société civile, les observateurs nationaux et internationaux, les forces de défense et de sécurité pour leur contribution au bon déroulement des élections.
La Mission d’Observation Electorale de l’Eglise Catholique (MOEEC) exprime sa profonde gratitude aux candidats pour leur comportement honorable avant, pendant et après les élections. C’est le Burkina Faso tout entier qui en sort grandi.
La Mission d’Observation Electorale de l’Eglise Catholique (MOEEC) exprime enfin sa profonde gratitude à la Conférence Episcopale Burkina-Niger, aux partenaires techniques et financiers dont l’appui inestimable a rendu possible le bon accomplissement de sa toute première mission d’observation.
Que Dieu bénisse le Burkina Faso !
Ouagadougou le 08 décembre 2015
La Mission d’Observation Electorale de l’Eglise Catholique (MOEEC)